Définition
La responsabilité contractuelle est, avec la responsabilité délictuelle, une des deux parties de la responsabilité civile dont s'inspire le juge administrative. Elle est engagée en cas de mauvaise exécution ou d'inexécution totale ou partielle des obligations nées d'un contrat. Ce régime de responsabilité est prévu à l'article1147 du code civil qui dispose que :
« Le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, toutes les fois qu'il ne justifie pas que l'inexécution provient d'une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu'il n'y ait aucune mauvaise foi de sa part. »
■ ■ ■ Effets de la réception. Les fautes de conception ou d'exécution éventuellement commises ne sont plus susceptibles d'engager la responsabilité contractuelle des constructeurs dès lors que la réception a été prononcée.
Si le maître de l’ouvrage ne peut plus invoquer les désordres apparents causés à l’ouvrage ou aux tiers dès lors que la réception des travaux est prononcée, seul le décompte général et définitif lui interdit toute réclamation relative à des préjudices subis à l’occasion des travaux du fait de retards ou de travaux supplémentaires (Conseil d'Etat n° 264490 du 6 avril 2007 - Centre hospitalier général de Boulogne-sur-Mer).
Le maître d'ouvrage reste toutefois recevable à exciper de la responsabilité contractuelle des maîtres d'oeuvre pour défaut de conseil à la réception (CAA Nancy, 5 juill. 2010, Département de la Marne, n° 09NC00806)
■ ■ ■ Etendue de la responsabilité contractuelle d'un bureau d'étude. "si l'exécution de l'obligation du débiteur d'une prestation d'étude prend normalement fin avec la remise de son rapport et le règlement par l'administration du prix convenu, sa responsabilité reste cependant engagée, en l'absence de toute disposition ou stipulation particulière applicable à ce contrat, à raison des erreurs ou des carences résultant d'un manquement aux diligences normales attendues d'un professionnel pour la mission qui lui était confiée, sous réserve des cas où, ces insuffisances étant manifestes, l'administration aurait, en payant la prestation, nécessairement renoncé à se prévaloir des fautes commises" (CE, 9 avr. 2010, commune de Levallois-Perret, n° 309662 )
■ ■ ■ Formalisme du décompte définitif et responsabilité contractuelle. La responsabilité contractuelle d'un titulaire d'un marché de maitrise d'oeuvre ne peut être engagé si le maître d'ouvrage ne modifie pas le projet de décompte transmis par le maître d'oeuvre et s'il procède à son paiement dans sa totalité. Dans ce cas, le décompte n'a pas à faire l'objet d'une décision explicite et devient donc de fait définitif, soldant les relations contractuelles entre les parties (CE, 9 juin 2017, n° 408082).
■ ■ ■ Responsabilité décennale et réception avec réserves. En cas de réception avec réserves, la garantie décennale ne peut être invoquée par le maître d'ouvrage sur les parties d'ouvrage ayant fait l'objet de ces réserves. Dans ce cas, les relations contractuelles se poursuivent jusqu'à la levée des réserves (CAA de Nantes, 24/11/2017, n° 16NT01776).
■ ■ ■ Co-responsabilité du maître d'ouvrage. Lorsqu'un maître d'ouvrage est doté d'un service technique, il ne peut invoquer les manquements du maître d'oeuvre dans la conception de l'ouvrage pour ne pas avoir à supporter les réparations rendues nécessaires. Le Conseil d'Etat à jugé que "le maître d'oeuvre a commis des fautes, concourant à 80% à la réalisation du préjudice subi par la COMAGA, laquelle compte tenu de ce qu'elle est dotée de services techniques, doit garder une part de responsabilité égale à 20%, à sa charge". (CE 26 juillet 2018 Commune d’agglomération du Grand Angoulême, n° 418266).
■ ■ ■ Responsabilité du maître d'oeuvre et modification réglementaire. En cas d'évolution d'un texte réglementaire impactant la réalisation de l'ouvrage, intervenant postérieurement à la conclusion du marché de maîtrise d'oeuvre, il est de sa responsabilité d'alerter le maître d'ouvrage du risque de non-conformité des travaux à la nouvelle réglementation et de lui proposer un avenant. Dans le cas contraire, il engage sa responsabilité contractuelle (CAA de Douai, 4 octobre 2018, n° 17DA00437).
■ ■ ■ Contrats de prestations intellectuelles / études. Si l'exécution de l'obligation du débiteur d'une prestation d'étude prend normalement fin avec la remise de son rapport et le règlement par l'administration du prix convenu, sa responsabilité reste cependant engagée, en l'absence de toute disposition ou stipulation particulière applicable à ce contrat, à raison des erreurs ou des carences résultant d'un manquement aux diligences normales attendues d'un professionnel pour la mission qui lui était confiée, sous réserve des cas où, ces insuffisances étant manifestes, l'administration aurait, en payant la prestation, nécessairement renoncé à se prévaloir des fautes commises (CAA Nantes, 31 janvier 2020, n° 18NT01246).
Clauses limitatives de responsabilité
Les clauses limitatives de responsabilité sont inefficaces en cas de faute lourde (non intentionnelle) et/ou dolosive (intentionnelle) et/ou manquement à une obligation essentielle. Le manquement de l'une des parties à son obligation essentielle prive d'effet la clause limitative de responsabilité, réputée non écrite en raison de son absence de cause (Cass.com., « Chronopost », 22/10/1996) ; sous réserve que la clause contractuelle aménageant la responsabilité des parties contredire l'obligation essentielle, en d'autres termes la vide de sa substance, et non seulement y porte atteinte (Cour de cassation, 29 juin 2010, Faurecia).